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Amour et vitriol, le procès : la vitrioleuse acquittée !

Le procès

Dans l'article Amour et vitriol, nous avons évoqué un drame du vitriol qui s'est déroulé le 7 juillet 1916 au 28 rue Affre. Marie Auber a jeté un bol de vitriol sur le visage de son mari, Gabriel, alors endormi. L'époux vitriolé est mort à l’hôpital Lariboisière après vingt deux heures de souffrances. Les différents journaux qui parlent alors de cette affaire évoquent d'abord la jalousie de Marie Auber comme motif de son crime. Voilà donc la suite.

Le 29 juillet, on apprend que Marie Auber est logiquement renvoyée devant la chambre des mises en accusation par le juge d'instruction Boucard, pour coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort. Sa défense devant la cour d'assise est assurée par une avocate, en l'occurrence une des premières femmes avocates en France et militante féministe, maître Agathe Dyvrande (cabinet au 14 rue Littré dans le 6e arrondissement).

 

Amour et vitriol, la suite : la vitrioleuse acquitée !

Extrait du journal Le Petit Parisien, édition du 29 juillet 1916

 

Le déroulement du procès au assises est chroniqué par plusieurs journaux en date du 21 septembre 1916 (Le Figaro, Le Matin, Le Petit Parisien...). Il est à noté que les délais d'alors sont loin de ceux d'aujourd'hui, le procès de Marie Auber se déroule moins de trois mois après les faits. On est loin des lenteurs actuelles de la Justice.

 

Et pendant ce temps, il jouait de la mandoline1

Le déroulé du procès nous en apprend un peu plus sur les protagonistes et les circonstances du drame du vitriol de la rue Affre. On découvre que Marie Euphrasie Auber est une "rousse, à la physionomie quelconque" (Le Figaro) et que les époux Auber, mariés en janvier 1911, sont "beaux cousins" et ont un enfant. Il s'avère également que la jalousie évoquée lors du drame est d'abord le fait de la victime, Gabriel Auber. Ce dernier est présenté comme un mari envahi par une jalousie dévorante, rendant la vie impossible à son épouse, forcée de se réfugier dans sa famille pour échapper au courroux de son époux.

Mais le mari jaloux se révèle aussi être un mari volage, connu pour "courtiser les dames qui l'adulaient et dont il était l'amant" (Le Petit Journal), ce dont il se vantait auprès de sa femme. Parmi ses conquêtes extra-conjugales, il eut une aventure avec une voisine de l'immeuble. C'est un de ses amis qui en avertira Marie Auber. Celle-ci prémédite alors sa vengeance. Elle achète donc 350 grammes de vitriol pour 0fr.65 chez un marchand de couleurs pour exécuter son plan (elle en voulait un litre, ce que lui refusa le commerçant). Au tribunal, elle confie ses sentiments : "Mon mari (...) me trompait avec une voisine. C'est un de ses amis qui m'a révélé ses infidélités. Alors j'ai perdu la tête. Je souffrais épouvantablement. Et pendant ce temps, il jouait de la mandoline1 dans la boutique. J'ai alors voulu le marquer pour qu'il soit désormais en horreur aux autres femmes et pour qu'il m'appartienne tout entier." La suite nous la connaissons déjà, et nous nous épargnerons la description détaillée des blessures atroces de la victime que rapporte méticuleusement le chroniqueur du Figaro.

 

Amour et vitriol, le procès : la vitrioleuse acquittée !

Extrait du journal Le Rappel, édition du 21 septembre 1916

 

Acquittée !

Ce que nous ne connaissions pas jusque là, c'est l'issue du procès de Marie Auber, la "vitrioleuse". Et le verdict, qui peut surprendre, n'est plus ni moins que l'acquittement. En effet, après réquisition de l'avocat général Frémont et la plaidoirie de Mlle Dyvrande, l'avocate de Marie Auber dont on souligne l'émotion de son intervention, les jurés de la cour d'assise ont prononcé l'acquittement pour l'accusée.

 

Amour et vitriol, la suite : la vitrioleuse acquitée !

Extrait du journal Le Matin, édition du 21 septembre 1916

 

               

 1 : "Jouer de la mandoline" est une expression argotique synonyme de masturbation (féminine). On peut imaginer qu'ici il s'agit littéralement de jouer d'un instrument de musique.

 

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